Je sais pas vous, mais quand j'entends ou je lis des consignes de sécurité, ça me met hors de moi. Les consignes du genre "attention à la marche", "attention ça glisse", "attention c'est chaud" me gonflent. La consigne de regarder où je mets les pieds, c'est ma Maman qui me l'a inculquée, et après quelques bûches je considère que c'est rentré. C'est comme ça qu'on apprend. Et si je trébuche sur une branche en forêt, je ne vais pas coller un procès aux gardes champêtres parce qu'il n'y avait pas de panneau disant de faire attention aux branches.
Si ces indications débiles n'avaient aucun effet, pourquoi seraient-elles toujours là ? Il doit bien avoir un effet répulsif, comme si prévenir les gens suffisaient à diminuer la responsabilité face aux erreurs commises. Du genre "T'es mort mais on t'a prévenu, donc c'est de ta faute ne vient pas nous traîner en justice". Un peu comme les décharges qu'on signe avant de faire un saut en parachute... pas sûr que ça serve à quelque chose, même en procès. Mais dans l'esprit des gens, ça doit avoir un effet dissuasif.
Outre le fait de s'épargner les désagréments d'une cour de justice, ces avertissements superflus ont l'effet d'annihiler toute l'éducation qui doit se faire dans les premières années de l'enfance : vu le nombre de fois qu'on nous répète quand on est petits de regarder à droite et à gauche en traversant, si un gars se fait avoir, c'est qu'il avait plus le karma d'une endive que d'un homo-sapiens.
Du coup, on est submergé d'annonces de sécurité censées nous rassurer. Comme quand on monte dans un avion ou un bateau, on se paie des minutes entières de discours sur où sont placés les dispositifs de sécurité et que faire en cas de pépin. Franchement, quand c'est la panique à bord, vous croyez vraiment qu'on va se rappeler l'alinéa 4 de la fiche sécurité sur quand et comment gonfler son gilet de sauvetage ? Non, ce qui sauve la vie des gens, c'est les talents du pilote, pas les consignes de l'hôtesse.
Puis moi ces pseudo-consignes de sécurité me font plus angoisser qu'autre chose. Si elles sont là, c'est qu'il doit bien avoir une raison, non ? Imaginez le livreur de pizza mettant bien en évidence sur la boite le numéro du centre antipoison le plus proche. Ou bien le maître d'école qui se veut rassurant lors du premier jour de votre enfant en disant "Ne vous inquiétez pas on a mis des distributeurs de préservatifs dans toutes les classes". C'est sûr, avec c'est mieux que sans. Mais c'est pas garanti que vous passiez une bonne journée ensuite. Ces mesures de sécurité nous font systématiquement imaginer le pire, en bons hypocondriaques sociaux que nous sommes. Et puis on espère que dans la pire extrémité, c'est pas les "dispositifs de sécurité" qui vont nous sauver, mais ce truc qui fait que l'humanité a survécu durant ces trois derniers millions d'années : L'instinct de survie. Courir vite et éviter de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment.
Tout est dangereux. Même préparer une salade de tomates est dangereux (mon pauvre pouce). Nous sommes conditionnés par tout un tas de messages sécuritaires censés nous rassurer mais qui ont tout l'effet inverse, et permet de manipuler les gens facilement : "mange pas ça", "regarde pas ça", "ne va pas là", "reste pas là", "ne va pas dans ce pays", "aies peur de ces gens là"... c'est pour ton bien. C'est pour ta sécurité ! La sacro-sainte invocation est lâchée ! Nous voilà tous redevenus dociles comme des moutons. Il y a mille ans, c'était la menace d'aller pourrir en enfer qui tenait les gens, aujourd'hui c'est la crainte de se brûler avec son Starbucks trop chaud ou la peur des gens qui ne vivent pas comme nous.
Il n'y a qu'à regarder les news, tout est fait pour apeurer et contrôler : H1N1, terrorisme, incidents dans les banlieues, accidents de voitures, etc etc etc...
Alors merde ! Laissez-moi peinard, regarder la mer et les bateaux sans savoir combien de radeaux de sauvetage sont sur ce ferry. Laissez moi me brûler avec mon café. Laissez-moi trébucher sur une marche ou déraper sur un sol glissant. Laissez-moi tomber d'une falaise si ça me chante. Laissez-moi être malade de la grippe. Laissez-moi! Parce que même si c'est pas agréable, les erreurs que je fais, les galères, les soucis et les problèmes, ça fait quelque chose à raconter, et ça me donne l'impression que le chemin que j'ai parcouru dans la vie n'était pas si facile et que je mérite ce que j'ai gagné. Ça fait de moi un vétéran du Starbucks café, un warrior de la salade de tomates, le rambo du quotidien citadin.
Sinon la planète va être peuplée de gros, incapables de lever les pieds, lobotomisés par CNN, et buvant du café tiède.
2 commentaires:
non non, mais t'es barge, hein, cette fois c'est sûr !
Merci, venant de toi, ça me rassure.
Enregistrer un commentaire